Comment s’émerveiller aujourd’hui des particularités de ce monde quand on a la sensation que l’être humain a déjà tout découvert, marché sur chaque parcelle de cette planète ? C’est là qu’entrent en scène les artistes aux esprits dont l’ancrage, à la fois dans le réel et l’imaginaire, dépasse la normale. Lorsque la moindre matière est devenue chose commune pour la conscience collective, souvent blasée ne serait-ce que par un grain de poussière, il suffit de la réinventer, de mettre en exergue ses forces ou ses faiblesses.
Ainsi le basalte noir, roche volcanique qui a révélé son omniprésence au fond des océans, prouvé sa beauté au travers d’œuvres splendides et millénaires telles que la statue de Cléopâtre exposée au musée de Saint-Pétersbourg, devient dans cette galerie la proie d’une simple machine à système hydraulique. De la fragilité et de l’éphémère s’expriment dans cette salle de Galleria Continua « Les Moulins » par la mise en scène The way we were d’Arcangelo Sassolino. Le basalte noir finit par céder sous le poids d’une presse dont le piston s’abat continuellement sur lui avec force et vitesse en moins de deux minutes. La pierre, à l’instar de l’existence, est prise ainsi dans un cycle perpétuel de destruction qui la brise puis la réduit en poussière. C’est là son destin, inéluctable.
Depuis 2007, des galeristes italiens déploient au milieu des champs de Boissy-le-Châtel, mais aussi au cœur de la Toscane et en Chine, des trésors artistiques dans le cadre du projet Galleria Continua. L’ancienne usine de fabrication de papier de 10.000 m² a ainsi repris goût à la vie accueillant en son sein diverses œuvres d’artistes internationaux, certaines des expositions se terminant d’ailleurs le 2 juin. Notamment l’exposition Jardinera au travers de laquelle Susana Pilar « part de l’intime pour travailler sur le jardin de l’histoire ». Les photographies extraites de la série Anexión oculta (2008) sont prompts à immerger le visiteur au cœur d’une réflexion sur la notion d’accident, la relation entre la vie et la mort étant un thème récurrent chez cette artiste cubaine. La Jardinera se termine par des photographies de la série Llave maestra (2012) axée sur la condition des femmes cubaines.
La diversité des œuvres de Galleria Continua ne peut que ravir un large public, des limites de la matière aux limites de l’être humain en passant par les Paintings from long ago empruntes d’onirisme et d’une grande profondeur de Nedko Solakov.

Arcangelo Sassolino
Canto V, 2016
Bois, acier, système hydraulique 183 x 485 x 53 cm
Travail unique
Courtesy : l’artiste et GALLERIA CONTINUA, San Gimignano / Beijing / Les Moulins / Habana

Susana Pilar
Llave maestra (Master key), 2012
Tirages numériques, photos noir et blanc, papier mat 80 x 60 cm chaque
Courtesy : l’artiste et GALLERIA CONTINUA, San Gimignano / Beijing / Les Moulins / Habana

Arcangelo Sassolino
The way we were, 2018
Presse, acier, système hydraulique, basalte noir 240 x 62 x 78 cm
Travail unique
Courtesy : l’artiste et GALLERIA CONTINUA, San Gimignano / Beijing / Les Moulins / Haban

José Yaque
El Río y la fabrica, 2017
Installation in situ
Dimensions variables
Courtesy : l’artiste et GALLERIA CONTINUA, San Gimignano / Beijing / Les Moulins / Habana
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Photo principale de l’article :
Ahmed Mater
Vue d’exposition Stand in the Pathway and See – Galleria Continua / Les Moulins, France, 2018
Courtesy : l’artiste et GALLERIA CONTINUA, San Gimignano / Beijing / Les Moulins / Habana